« New Buja », le foot pour aider les réfugiés à soigner leurs traumas
Rien ne lui résiste. « New Buja » , pour « Nouvelle Bujumbura », est un club de football de réfugiés burundais vivant en Ouganda. Zoom sur cette équipe qui contribue à bâtir la paix et la compréhension entre réfugiés et les communautés hôtes.
« C’est un succès magistral que le staff n’est pas près d’oublier », s’enthousiasme Germain, membre de l’encadrement de « New Buja », pour « Nouvelle Bujumbura ». Contrairement à ce que son nom indique, cette formation n’a pas remporté le championnat burundais de football mais bien la troisième édition du tournoi « Kalima Peace Building Africa ». Organisée chaque année en Ouganda, cette compétition rassemble une vingtaine d’équipes composées d’exilés provenant de sept pays. Et ce sont donc les Burundais qui se sont imposés, le 4 juin dernier, en gagnant 2-0, en finale, au stade de Nakivale.
Au cœur d’un camp de réfugiés
« New Buja » s’est créée dans cette ville du sud-ouest de l’Ouganda, située à environ 300 kilomètres de la capitale Kampala. Pas un hasard puisqu’un camp de réfugiés y est érigé. Il accueille plus de 100.000 personnes, venues, entre autres, de République démocratique du Congo (RDC), d’Erythrée, d’Ethiopie, du Rwanda, de Somalie et donc du Burundi. Des Burundais venus, ici, par milliers, après avoir fui la crise de 2015.
Au départ, le club regroupait des réfugiés burundais vivant en Ouganda et quelques jeunes locaux venant des quartiers défavorisés. Les joueurs se rencontraient régulièrement sur le terrain du camp de réfugiés de Nakivale pour discuter, terminer leur journée par quelques gorgées de Kanyanga, ou fumer des joints de cannabis.
Bientôt la D1 ougandaise ?
Petit à petit, le club s’est monté, les effectifs ont grossi, le niveau s’est élevé, jusqu’à ce que l’équipe truste, donc, les sommets. « New Buja » est devenue un véritable rouleau compresseur comme en témoignent ses récentes victoires lors des compétitions organisées par la mairie de Nakivale en 2020 et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés en Ouganda en janvier 2023.
Détentrices de toutes les coupes ouvertes cette saison aux réfugiés, le champion de « Kalima peace building » n’a qu’une obsession : rejoindre la première division ougandaise. « On essaie de se préparer du mieux que l’on peut. Sinon, la consigne reste la même pour les joueurs : rester concentrés », fait savoir Albert, un des membres de l’équipe.
Le foot pour guérir
D’autant que « New Buja » compte de nombreux jeunes de moins de 25 ans. « On se devait de trouver une solution pour mieux les encadrer », explique Michel, un des fondateurs du club. Ce dernier rappelle que faire perdurer une équipe composée de jeunes burundais, n’est pas chose aisée, évidemment en raison de leur passé. « On se doit de tenir le cap, car l’exil est une chose terrible. La majorité de nos joueurs souffraient de dépression et de stress post traumatique liés à la crise de 2015 et au chemin de l’exil. Certains d’entre eux étaient devenus toxicomanes mais on a dû organiser plusieurs séances avec trois addictologues. De même, deux fois par semaine, on a planifié des séances de coaching individualisées et axées sur la psychologie après chaque entraînement. Quatre psychologues étaient présents pour aider nos joueurs à soigner leurs traumas », raconte Michel.
Aujourd’hui, le football les aide à retrouver un semblant de normalité et même à rêver puisque six joueurs de l’équipe seraient convoités par des grandes équipes d’Afrique de l’Est et du Nord. Même si le club fait face à des problèmes financiers récurrents et a dû renoncer à plusieurs tournois, la mission de « New Buja » est avant tout sociale. « On est une famille, on se doit de se serrer les coudes, même en dehors du terrain et « New Buja » nous permet de rester debout », conclut Éric, le capitaine de l’équipe.