—  Récits  —

Antoine Gizenga, l’homme qui ne baisse jamais les bras

- 16 septembre 2025
De nationalité congolaise mais né au Burundi, Antoine Gizenga raconte être le produit de la colonisation. © Angèle Mariage.

Antoine Gizenga, 62 ans, est né au Burundi et a immigré à Leuze-en-Hainaut en 2021. Il livre aujourd’hui son histoire, sa nouvelle vie en Belgique ainsi que ses nombreux engagements.

Les mains posées devant lui, le regard doux et respirant la gentillesse, Antoine Gizenga s’apprête à relater son parcours. Il remonte à ses origines.

De nationalité congolaise mais né au Burundi, il raconte être le produit de la colonisation. « À l’époque coloniale, de nombreuses populations congolaises ont été envoyées au Burundi, pays voisin, afin d’en assurer son développement. C’est dans ce contexte que mes grands-parents sont arrivés dans ce pays en 1948 », révèle Antoine.

Ce dernier n’a pourtant jamais souhaité prendre la nationalité burundaise.

« Je n’aurais jamais osé rêver vivre en Belgique et me retrouver un jour comme un immigré. »

En 2018, après quelques années passées au Togo pour raisons professionnelles, Antoine Gizenga et sa femme souhaitent se réinstaller au Burundi. À cette période, le pays fait face à une grave crise politique et à de terribles violences.

Durant celle-ci, sa compagne reçoit de sérieuses menaces sur sa vie et est donc obligée de quitter le pays. C’est à partir de ces faits que son épouse demande une protection internationale dans les pays du nord. Ayant eu gain de cause, Antoine décide de la rejoindre dans le cadre du regroupement familial.

« Je n’aurais jamais osé rêver vivre en Belgique et me retrouver un jour comme un immigré , partage Antoine. Mais dans mon parcours, j’y ai été préparé car je suis né dans un pays qui n’était pas le mien, j’y ai vécu et j’y ai pris forme. Mon départ du Burundi a été un concours de circonstances », continue-t-il.

Leur choix se porte sur la Belgique en raison des relations historiques entre le Burundi, le Congo et la Belgique. « Comme ce sont d’anciennes colonies belges, nous nous sentions beaucoup plus proches de la Belgique que des autres pays européens », exprime Antoine.

Leuzois d’adoption

En Belgique, le plus grand défi d’Antoine a été son intégration et son adaptation dans un nouveau pays mais il y est arrivé. Tout y était pourtant différent : la culture, le climat, les mets, etc. « J’aime beaucoup les plats belges mais c’était au départ des challenges de les manger  », plaisante Antoine « Je suis très bien en Belgique. Je me sens leuzois d’adoption. »

« J’aime beaucoup les plats belges mais c’était au départ des challenges de les manger. »

Néanmoins, Antoine souhaite préserver certains aspects de sa culture notamment le respect des seniors. « Dans ma culture, on n’appelle pas les seniors par leur prénom. On les appelle soit papa, soit tonton, soit vieux. Quand on dit vieux, cela ne veut pas dire que tu es décrépit mais que tu es sage », révèle-t-il l’air rieur.

Peu de perspectives

Au cours de sa vie, Antoine réalise beaucoup de formations. Il commence par un master en sciences de l’éducation à l’Université du Burundi et fréquente ensuite l’institut supérieur de Management de Dakar au Sénégal. Par la suite, il suit également une formation à distance sur la théologie biblique via l’Université de Stanford aux Etats-Unis.

« Ma carrière a évolué de manière fulgurante », confie-t-il. Antoine a très vite commencé à travailler pour des organisations internationales. La première ONG était la « National Democratic Institute » qui collabore avec le fonds USAID (agence des Etats-Unis d’Amérique pour le développement international). Après deux ans, ce poste au NDI s’est arrêté brutalement à la suite d’un coup d’État au Burundi.

Antoine rebondit par après en travaillant quelques années pour l’UNICEF. Après cela, il sera à nouveau engagé par une ONG « Aide et Action », située au Rwanda. « C’est à partir de là que j’ai commencé à voyager dans différents pays d’Afrique comme le Sénégal, la Tanzanie, le Burundi, le Togo et le Bénin. » 

« Je cherche toujours, qui ne risque rien n’a rien. »

Malgré ses nombreuses formations et expériences professionnelles, trouver un emploi en Belgique n’est pas chose aisée pour Antoine. Il a répondu à de nombreuses offres correspondant à ses qualifications.

Malheureusement il n’a pas encore trouvé de contrat fixe et cela est très dur à vivre pour lui. « Quand il s’agit de me donner un boulot, les gens me disent que je suis trop qualifié. Je cherche toujours, qui ne risque rien n’a rien », confie Antoine.

« Les études c’est ce qui me nourrit. »

Comme il n’arrivait pas à trouver un emploi, Antoine a repris des études et réalise un bachelier en formation d’adultes à Louvain-la-Neuve. « Les études c’est ce qui me nourrit. Au lieu de rester à la maison dans mes pantoufles, je préfère utiliser mon cerveau », explique-t-il.

Mourir le fusil à la main

Engagé et toujours motivé à donner de sa personne, Antoine fait partie de diverses associations leuzoises et tournaisiennes : « Je cherche à voir ce qui peut être fait autour de moi à l’instant présent. Notamment en faisant partie d’associations. »

« Sans l’esprit nous ne sommes rien et l’esprit est la base de tous les dons que nous devons posséder. »

Celui-ci vient également de démarrer sa propre association du nom de « Centre International de réveil chrétien ». Cette association cherche à remettre en avant l’éducation spirituelle. « L’éducation spirituelle est essentielle, il est impossible de continuer à évoluer dans la vie en oubliant les préceptes divins. Nous, les Hommes, sans l’esprit nous ne sommes rien et l’esprit est la base de tous les dons que nous devons posséder : sagesse, paix, etc. »

Malgré les nombreux obstacles rencontrés au cours de son existence, Antoine ne s’est jamais découragé.

« La vie c’est comme une guerre. Il faut mourir le fusil à la main. C’est pour cela que je ne me décourage jamais »,  conclut l’homme qui ne baisse jamais les bras.

Note : cet article a été rédigé par une étudiante en 2e année de l’option Information et Communication de l’UMons, dans le cadre d’un atelier coordonné par Lorrie D’Addario et Manon Libert.